Bonne année 2015 

11/01/2014
Bonne année 2015 
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« Les Français se noient dans le pessimisme », a titré le magazine Le Point pour le Nouvel An 2015.

Selon un sondage BVA, aucun peuple du monde ne se sent aussi malheureux, n’anticipe autant de catastrophes. Pour une grande majorité de Français (94 %), l’année 2015 sera une année de « difficultés économiques » au moins égales à celles de 2014. Seuls 6 % prédisent une année de prospérité.

À cela s’ajoutent les angoisses sur les guerres, le terrorisme, la destruction de l’environnement…

Est-ce raisonnable ? Exagéré ?

Difficile à dire. Et qui sommes-nous pour en juger ? Nous n’avons pas de boule de cristal !

Mais depuis que le monde est monde, il y a de bonnes raisons d’être inquiet. Famines, épidémies, sauterelles, guerres, pillages… nos ancêtres souffraient-ils moins que nous ? Pas sûr.

C’est pourquoi j’aime à me rappeler cette phrase d’un ami : « Quand tu angoisses sur la vie présente, pense à ton dentiste ! »

Comme il a raison ! Est-il possible que nous ayons déjà oublié la chance que nous avons de pouvoir nous faire soigner les dents avec un minimum de douleur ? S’il n’y avait que cela, ne serait-ce pas déjà une énorme raison de se réjouir d’être en 2015 ? Il aurait pu dire aussi « pense à ton chirurgien ».

Alors, pour mes bons vœux 2015, j’ai décidé de vous envoyer ce morceau d’anthologie de la littérature « médicale ».

Il a été écrit en 1884, à Paris, par un auteur qui revient un peu à la mode en ce moment, JK Huysmans. Cela raconte la visite chez le dentiste de Jean des Esseintes, le héros du roman « À rebours ».

Je vous souhaite une bonne année 2015, et accrochez-vous bien à votre fauteuil !
« Jean des Esseintes fut pris, au milieu d’une nuit, d’une abominable rage de dents. Il se tamponnait la joue, butait contre les meubles, arpentait, semblable à un fou, sa chambre.

C’était une molaire déjà plombée ; aucune guérison n’était possible ; la clef seule des dentistes pouvait remédier au mal. Il attendait, tout enfiévré, le jour, résolu à supporter les plus atroces des opérations, pourvu qu’elles missent fin à ses souffrances.

Tout en se tenant la mâchoire, il se demandait comment faire. Les dentistes qui le soignaient étaient de riches négociants qu’on ne voyait point à sa guise ; il fallait convenir avec eux de visites, d’heures de rendez-vous. C’est inacceptable, je ne puis différer plus longtemps, disait-il ; il se décida à aller chez le premier venu, à courir chez un quenottier du peuple, un de ces gens à poigne de fer qui, s’ils ignorent l’art bien inutile d’ailleurs de panser les caries et d’obturer les trous, savent extirper, avec une rapidité sans pareille, les chicots les plus tenaces ; chez ceux-là, c’est ouvert au petit jour et l’on n’attend pas. Sept heures sonnèrent enfin. Il se précipita hors de chez lui, et se rappelant le nom connu d’un mécanicien qui s’intitulait dentiste populaire et logeait au coin d’un quai, il s’élança dans les rues en mordant son mouchoir, en renfonçant ses larmes.

Arrivé devant la maison, reconnaissable à un immense écriteau de bois noir où le nom de « Gatonax » s’étalait en d’énormes lettres couleur de potiron, et en deux petites armoires vitrées où des dents de pâte étaient soigneusement alignées dans des gencives de cire rose, reliées entre elles par des ressorts mécaniques de laiton, il haleta, la sueur aux tempes ; une transe horrible lui vint, un frisson lui glissa sur la peau, un apaisement eut lieu, la souffrance s’arrêta, la dent se tut.

Il restait, stupide, sur le trottoir ; il s’était enfin roidi contre l’angoisse, avait escaladé un escalier obscur, grimpé quatre à quatre jusqu’au troisième étage. Là, il s’était trouvé devant une porte où une plaque d’émail répétait, inscrit avec des lettres d’un bleu céleste, le nom de l’enseigne. Il avait tiré la sonnette, puis, épouvanté par les larges crachats rouges qu’il apercevait collés sur les marches, il fit volte-face, résolu à souffrir des dents, toute sa vie, quand un cri déchirant perça les cloisons, emplit la cage de l’escalier, le cloua d’horreur, sur place, en même temps qu’une porte s’ouvrit et qu’une vieille femme le pria d’entrer.

La honte l’avait emporté sur la peur ; il avait été introduit dans une salle à manger ; une autre porte avait claqué, donnant passage à un terrible grenadier, vêtu d’une redingote et d’un pantalon noirs, ; des Esseintes le suivit dans une autre pièce.

Ses sensations devenaient, dès ce moment, confuses. Vaguement il se souvenait de s’être affaissé, en face d’une fenêtre, dans un fauteuil, d’avoir balbutié, en mettant un doigt sur sa dent : « elle a déjà été plombée ; j’ai peur qu’il n’y ait rien à faire. »

L’homme avait immédiatement supprimé ces explications, en lui enfonçant un index énorme dans la bouche ; puis, tout en grommelant sous ses moustaches vernies, en crocs, il avait pris un instrument sur une table.

Alors la grande scène avait commencé. Cramponné aux bras du fauteuil, des Esseintes avait senti, dans la joue, du froid, puis ses yeux avaient vu trente-six chandelles et il s’était mis, souffrant des douleurs inouïes, à battre des pieds et à bêler ainsi qu’une bête qu’on assassine.

Un craquement s’était fait entendre, la molaire se cassait, en venant ; il lui avait alors semblé qu’on lui arrachait la tête, qu’on lui fracassait le crâne ; il avait perdu la raison, avait hurlé de toutes ses forces, s’était furieusement défendu contre l’homme qui se ruait de nouveau sur lui comme s’il voulait lui entrer son bras jusqu’au fond du ventre, s’était brusquement reculé d’un pas, et levant le corps attaché à la mâchoire, l’avait laissé brutalement retomber, sur le derrière, dans le fauteuil, tandis que, debout, emplissant la fenêtre, il soufflait, brandissant au bout de son davier, une dent bleue où pendait du rouge !

Anéanti, des Esseintes avait dégobillé du sang plein une cuvette, refusé, d’un geste, à la vieille femme qui rentrait, l’offrande de son chicot qu’elle s’apprêtait à envelopper dans un journal et il avait fui, payant deux francs, lançant, à son tour, des crachats sanglants sur les marches, et il s’était retrouvé, dans la rue, joyeux, rajeuni de dix ans, s’intéressant aux moindres choses. »

À votre santé !

Jean-Marc Dupuis

 

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jean-louis Peyraut
jean-louis Peyraut
9 années plus tôt

Merci, docteur, je vais me faire arracher quelques dents demain !… Rien de l’enfer vécu par ce pauvre des Esseintes a vécu !… Mais c’est assez terrible comme çà !…

mOUSEL
mOUSEL
9 années plus tôt

Je ne fais pas partie de votre communauté et d’ailleurs je n’appartiens à aucune communauté.

Franchement écœuré par votre lettre de vœux. Déjà je me posais des questions sur l’aspect fortement commercial de votre lettre qui sous tendait un côté fric désagréable mais de là à écrire cette lettre quatre jours après ce que nous venons de vivre vous dénonce définitivement.
Ais je besoin de compléter mon courrier en disant que je ne veux plus rien recevoir de vous !

Pmp
Pmp
9 années plus tôt
Reply to  mOUSEL

Bon vent ! J’pense pas non plus que quiconque ait envie de vous communiquer quoi que ce soit.

Portez-vous bien… si possible !

gio
gio
9 années plus tôt
Reply to  mOUSEL

Après la douleur, le réconfort.
Garder l’espoir d’un monde meilleur.
Bien à vous.

mina
mina
9 années plus tôt

Bonne année pessimiste oui on l’ai .mais ça change quoi .?prenons la vie telle qu,’elle essayons de faire du bien et regardons les bons côtés des choses …………on a des dentistes. BONNE ANNÉE sante inovation

GUENARD
GUENARD
9 années plus tôt

Un grand merci à vous pour cette histoire de 1884 qui a pourtant dû être vécue par pas mal de personnes à cette époque. Et oui! je remercie la vie de vivre à notre époque, avec tout le progrès de la médecine et surtout sans la douleur comparable à celle que devait subir nos ancêtres.

le garf
le garf
9 années plus tôt

quelle histoire hilarante si j’ose dire! exprimée avec verve, souci du détail et beaucoup d’humour! en attendant, je me suis retrouvée presque une soixantaine d’années en arrière , me souvenant de ces jeudis sombres et horribles où je devais me faire arracher une dent, l’angoisse de l’extraction, de la souffrance, votre histoire est super bien décrite quand vous exagérez en décrivant le bras du dentiste qui veut entrer jusqu’au fond du ventre , mais quand on est dans cette posture d’extraction de dent avec ces vieux instruments, on en est presque là! Je ne pensais pas que je pourrais un… Lire la suite »

Carpentier Emmanuel
Carpentier Emmanuel
9 années plus tôt

Merci pour vos voeux, mr Dupuis, ainsi que pour votre superbe travail d’information et de vulgarisation qui tire le lecteur vers le haut !! Naturothérapeute et magnétiseur, vos lettres et dossiers me sont toujours précieuses; remise à jour des connaissances et synthèse de l’actualité des soins “alternatifs” au programme… Recevez, à votre tour, mes meilleures énergies pour cette nouvelle année, à partager, bien sur, avec ceux que vous aimez et, comme vous semblez l’apprécier à sa juste valeur, avec l’humanité entière. Cordialement. E. C

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