Et s’ils n’étaient pas fous, juste traumatisés ?

19/03/2023
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Et s’ils n’étaient pas fous, juste traumatisés ?

Connaître le syndrome post-traumatique complexe (SPTC)

Vous êtes-vous déjà entendu dire “Elle est vraiment trop sensible, elle ne sait pas gérer ses émotions”, “Il a une grosse carapace, c’est comme ça”, “C’est fou qu’il n’arrive jamais à garder une relation plus de quelques mois” ?

Il existe en effet de nombreux troubles de la personnalité qui interfèrent avec les relations sociales.

On distingue en particulier :

  • les personnalités hypersensibles, qui vont réagir de façon disproportionnée à des événements bénins ;
  • les personnalités manipulatrices, qui se servent des autres en rendant le minimum, et qui rompent dès que l’autre cesse d’accepter de se laisser exploiter ;
  • les personnalités psychopathiques, qui sont des personnes incapables de se représenter les émotions des autres ; elles peuvent agir sans tenir aucun compte des souffrances qu’elles infligent aux autres, y compris lorsqu’il y a danger de mort ou de suicide.

Les personnalités hypersensibles peuvent évoluer, par des thérapies que nous décrirons plus loin. Les deux autres catégories, malheureusement, n’évoluent pour ainsi dire jamais.

Dans d’autres cas, les manifestations ci-dessus sont des symptômes de syndrome post-traumatique complexe (SPTC). Il existe alors des outils pour aller mieux.

Qu’est-ce que le SPTC (syndrome post-traumatique complexe) ?

Le SPTC est une forme de trouble de stress post-traumatique (TSPT) qui se développe à la suite d’un événement traumatique ou de plusieurs événements traumatiques qui se sont produits à différents moments de la vie d’une personne.

Selon l’American Psychiatric Association (APA), le SPTC est caractérisé par une combinaison de symptômes du TSPT, tels que des flashbacks, des cauchemars et des évitements, ainsi que des symptômes liés à l’attachement et à la régulation émotionnelle.[1]

Les symptômes du SPTC peuvent inclure des sentiments de honte et de culpabilité, des problèmes de confiance, des difficultés à gérer les émotions et des problèmes relationnels. Il peut également y avoir des changements dans la perception de soi et du monde environnant. Les symptômes peuvent être graves et interférer avec le fonctionnement quotidien d’une personne.[2] Des recherches suggèrent qu’un traumatisme répété et prolongé, en particulier dans l’enfance, peut augmenter le risque de développer ce trouble.[3]

Le diagnostic est toujours très délicat à faire du fait des “facteurs confondants”. Comme souvent en psychiatrie, les symptômes peuvent être rattachés à différents troubles de la personnalité. Les professionnels eux-mêmes peuvent peiner à y voir clair.

Quelques chiffres sur la violence faite aux enfants en France

Les SPTC ont tendance à devenir plus fréquents dans notre société.

Et pour cause ! Prenons la génération de vos enfants (ou petits-enfants) nés entre 1990 et

2000 : selon une enquête menée en 2003 par l’Institut national d’études démographiques (INED), 7,3 % des filles et 1,4 % des garçons âgés de 18 à 24 ans ont déclaré avoir subi des violences sexuelles pendant leur enfance. [4]

La violence a progressé de façon vertigineuse dans les écoles, les rues, les transports en commun, tellement en fait que plus personne ne parvient à tenir le compte, la plupart des gens ayant carrément renoncer à porter plainte, devant l’inaction de la Justice.

A cela s’ajoutent un nombre de familles pathologiques de plus en plus nombreuses. Bien entendu, la famille reste, de loin, l’environnement le plus protecteur pour les enfants. Toutefois, les choses se dégradent vite sur ce front également : selon une enquête menée en 1999 par la Délégation interministérielle à la famille, 5,6 % des enfants de moins de 18 ans ont été victimes de violences sexuelles et 16,8 % ont été victimes de violences physiques ou psychologiques de la part de leur entourage familial[5] (principalement les beaux-parents et leurs enfants, demi-frères et demi-sœurs dans les familles recomposées mais aussi, dans une minorité de cas, les parents, frères et sœurs).

Toutes ces violences vont généralement être subies sur plusieurs années, et vont forcer l’enfant à développer les mécanismes dont il a besoin pour survivre à son atroce environnement. Ces mécanismes vont se cristalliser en SPTC à l’âge adulte.

Prise en charge

Les personnes atteintes de SPTC peuvent bénéficier d’une thérapie, telle que la thérapie cognitivo-comportementale, la thérapie d’exposition ou la thérapie centrée sur la personne, ainsi que de médicaments tels que les antidépresseurs.[6]

Cette prise en charge doit se faire à la suite d’un diagnostic rigoureux, ce qui reste très compliqué aujourd’hui.

Les différentes thérapies pour traiter le SPTC

La thérapie cognitivo-comportementale (TCC)

La thérapie cognitivo-comportementale (TCC) est une approche thérapeutique qui se concentre sur la modification des pensées et des comportements qui contribuent aux problèmes émotionnels et comportementaux. La TCC est utilisée pour traiter un large éventail de troubles mentaux, notamment le trouble de stress post-traumatique (TSPT) et le syndrome post-traumatique complexe (SPTC).

La TCC est généralement de courte durée et axée sur des objectifs. Les séances de thérapie sont structurées et axées sur les problèmes spécifiques que le patient souhaite traiter. Les techniques de TCC comprennent l’identification et la modification des pensées négatives, la gestion des émotions, l’exposition graduelle aux stimuli traumatisants et la modification des comportements dysfonctionnels.

Des études ont montré que la TCC est efficace pour traiter les symptômes du TSPT et du SPTC.[7] Les thérapies basées sur la TCC ont été utilisées avec succès chez les militaires, les vétérans et les survivants de violences sexuelles.[8]

La thérapie d’exposition

La thérapie d’exposition est une forme de thérapie qui vise à aider les personnes souffrant de troubles anxieux, y compris le trouble de stress post-traumatique (TSPT) et le syndrome post-traumatique complexe (SPTC). Cette approche implique d’exposer le patient à des souvenirs traumatisants, des images, des objets ou des situations associées à un événement traumatique, afin de réduire la peur et l’anxiété associées à ces souvenirs.

La thérapie d’exposition peut être réalisée de différentes manières, notamment en imaginant mentalement les souvenirs traumatisants, en regardant des images ou des vidéos, ou en visitant des endroits associés à l’événement traumatique. Cette exposition est effectuée de manière progressive et contrôlée, avec le soutien et la guidance du thérapeute.

Des études ont montré que la thérapie d’exposition est efficace pour traiter les symptômes du TSPT et du SPTC.[9] Cette approche peut être utilisée seule ou en combinaison avec d’autres types de thérapie, comme la thérapie cognitivo-comportementale (TCC).

Il est important de noter que la thérapie d’exposition peut être difficile et déclencher des émotions difficiles pour le patient. Elle doit être réalisée avec un thérapeute qualifié et expérimenté, qui peut fournir un soutien et des compétences en gestion de l’anxiété pour aider le patient à traverser ces émotions.

La thérapie centrée sur la personne

La thérapie centrée sur la personne, également connue sous le nom de thérapie non-directive ou thérapie client-centrée, est une approche thérapeutique qui met l’accent sur la relation entre le thérapeute et le patient. Cette approche vise à aider le patient à se développer et à se réaliser en tant que personne en lui fournissant un environnement thérapeutique sûr et non-jugeant.

Selon la thérapie centrée sur la personne, le patient a la capacité de résoudre ses problèmes et de se développer de manière autonome, mais il peut être entravé par des expériences passées ou des croyances négatives sur lui-même. Le thérapeute centré sur la personne travaille avec le patient pour comprendre ses expériences et croyances, et pour l’aider à trouver ses propres solutions à ses problèmes.

Cette approche thérapeutique met l’accent sur l’empathie, la compréhension et l’acceptation inconditionnelle du patient par le thérapeute. Le thérapeute ne dirige pas le patient ou ne lui donne pas de conseils, mais plutôt l’aide à trouver sa propre voie vers le développement personnel.

Des études ont montré que la thérapie centrée sur la personne peut être efficace pour traiter une variété de problèmes, notamment la dépression, l’anxiété et les troubles de l’alimentation.[10] Cette approche a également été utilisée avec succès dans le traitement des survivants de traumatismes, y compris les victimes d’agressions sexuelles et les anciens combattants.[11]

Et vous, que pouvez-vous faire pour aider vos proches atteints de SPTC ? [12][13]

Si vous êtes le proche d’une personne atteinte de syndrome post-traumatique complexe (SPTC), il peut être difficile de savoir comment aider votre proche à traverser cette période difficile. Voici quelques conseils qui peuvent vous aider, basés sur des recherches scientifiques récentes :

Écoutez et soyez présent : Être là pour votre proche et l’écouter sans jugement peut être très utile. Les personnes atteintes de SPTC peuvent se sentir seules, isolées et incomprises. Soyez présent et montrez de l’empathie pour leur situation. Veillez néanmoins à être attentif aux signaux de manipulation qui doivent vous alerter, en particulier si les plaintes sont accompagnées de tentatives d’obtenir de l’argent, de la reconnaissance ou d’autres avantages au détriment d’autres personnes.

Informez-vous sur le SPTC : Se renseigner sur les symptômes et les causes du SPTC peut aider à comprendre les réactions de votre proche. Cela peut également vous aider à mieux soutenir votre proche et à éviter les déclencheurs potentiels.

Encouragez votre proche à chercher de l’aide professionnelle : Les traitements tels que la thérapie cognitivo-comportementale (TCC), la thérapie d’exposition et la thérapie centrée sur la personne peuvent être efficaces pour traiter le SPTC. Encouragez votre proche à chercher de l’aide professionnelle auprès d’un thérapeute qualifié.

Évitez de juger ou de minimiser les expériences de votre proche : Les personnes atteintes de SPTC peuvent se sentir jugées ou minimisées par les autres. Évitez de minimiser ou de juger les expériences de votre proche, même si vous ne les comprenez pas complètement.

Prenez soin de vous-même : Le soutien d’un proche peut être très important, mais il est également important de prendre soin de vous-même. Assurez-vous de prendre le temps de vous reposer et de vous ressourcer.

Il est important de noter que chaque personne atteinte de SPTC est unique et peut nécessiter un soutien différent. N’hésitez pas à demander conseil à un professionnel de la santé mentale pour obtenir des conseils spécifiques à votre situation.

A votre santé,

Jean Marc Dupuis

 

[1] American Psychiatric Association (APA). (2013). Diagnostic and statistical manual of mental disorders (DSM-5®). American Psychiatric Pub.

[2] American Psychiatric Association (APA). (2013). Diagnostic and statistical manual of mental disorders (DSM-5®). American Psychiatric Pub.

[3] van der Kolk, B. A., Roth, S., Pelcovitz, D., Sunday, S., & Spinazzola, J. (2005). Disorders of extreme stress: The empirical foundation of a complex adaptation to trauma

[4] INED (2003). Les violences sexuelles subies pendant l’enfance. https://www.ined.fr/fichier/s_rubrique/18139/document_travail_150.1.pdf

[5] Délégation interministérielle à la famille (1999). Enquête sur les violences envers les enfants. http://www.violence-enfance.asso.fr/IMG/pdf/enquete-vef.pdf

[6] American Psychiatric Association (APA). (2013). Diagnostic and statistical manual of mental disorders (DSM-5®). American Psychiatric Pub.

[7] Bisson, J. I., Ehlers, A., Matthews, R., Pilling, S., Richards, D., & Turner, S. (2007). Psychological treatments for chronic post-traumatic stress disorder: Systematic review and meta-analysis. British Journal of Psychiatry, 190(2), 97-104.

[8] Resick, P. A., & Schnicke, M. K. (1993). Cognitive processing therapy for sexual assault victims. Journal of Consulting and Clinical Psychology, 61(5), 748-756.

[9] Bradley, R., Greene, J., Russ, E., Dutra, L., & Westen, D. (2005). A multidimensional meta-analysis of psychotherapy for PTSD. American Journal of Psychiatry, 162(2), 214-227.

[10] Elliott, R., Greenberg, L. S., & Lietaer, G. (2004). Research on experiential psychotherapies. Dans M. J. Lambert (dir.), Handbook of psychotherapy and behavior change (5ème éd., p. 493-539). New York, NY : Wiley.

[11] Cook, J. M., Newman, E., & Laska, K. M. (2006). A randomized controlled trial of cognitive processing therapy for veterans with PTSD. Journal of Clinical Psychology, 62(8), 943-953.

[12] Cloitre, M., Stovall-McClough, K. C., Nooner, K., Zorbas, P., Cherry, S., Jackson, C. L., & Gan, W. (2010). Treatment for PTSD related to childhood abuse: A randomized controlled trial. American Journal of Psychiatry, 167(8), 915-924.

[13] Herman, J. L. (1997). Trauma and recovery: The aftermath of violence–from domestic abuse to political terror. Basic books.

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Agnes Jacquemin
Agnes Jacquemin
1 année plus tôt

Bonjour je pense que vos chiffres sur les violences sexuelles sur les enfants et jeunes sont tres tres tres largement sous estimés. Et c’est là tout le problème, tant que l’on ne reconnaitra pas les vrais chiffres et des violences sur les enfants, d’après Amnesty 1 jeune sur 4 victime de viol, numero de janvier mars 2020, donc deja 24% de la population traumatisée et les vrais chiffres des violences sur les femmes quasiment une sur deux, on met tout cela ensemble c’est vertigineux, oui on essaye de noyer le poisson y compris au niveau des juges!!!! Et rappeler que… Lire la suite »

Romarin
Romarin
1 année plus tôt

Binjour,
Pensez à mettre vos connaissances à jour
Le sujet est trop grave pour être traité sans serieux.
En ce qui concerne le SSPT, c’est la technique de l’EMDR qui fait reference, OMS et ARS.
Bien cordialement,

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